dimanche 30 septembre 2012

30 septembre 2012: 26e Dimanche du Temps Ordinaire B

FAVORISER LA SECTE A LAQUELLE NOUS APPARTENONS EST DE L’IDOLATRIE

col fraymarcos

Mc 9, 38-48

CONTEXTE

Le texte d'aujourd'hui suit immédiatement celui que nous avons lu dimanche passé. C'est Jean qui, sans tenir compte de ce que vient de dire Jésus, passe à une question étrangère à ce dont il est question. Ce texte acquiert une signification encore plus profonde si nous nous rappelons que dans le même chapitre (Mc 9, 14-29), juste avant l'épisode que nous avons lu dimanche dernier, il nous est dit que le disciples ne purent expulser un démon ;
Bien que Jésus vienne de leur dire que celui qui veut faire partie des siens doive se charger de la croix, et que celui qui veut être le premier soit le dernier et le serviteur, les apôtres ne comprennent toujours pas.

Une fois de plus, Jésus doit corriger leur soif de supériorité. Ils s'efforcent toujours d'être ceux qui contrôlent le mouvement en train de naître autour de Jésus. Sous le prétexte du zèle, ils cherchent à s'assurer des privilèges. Il s'agit certainement de problèmes posés dans la communauté où se rédige l'évangile.

Le reste de ce que nous avons lu n'est pas un discours, mais un ensemble de dictons qui peuvent remonter à Jésus.

Il n'est pas l'un des nôtres. Le texte grec dit : « parce qu'il ne nous suit pas ». Cette petite nuance pourrait nous ouvrir une perspective nouvelle dans l'interprétation. Le seul fait de prononcer cette phrase suppose quelque type d'exclusion et un manque de compréhension de l'évangile. Le chrétien doit toujours être ferment d'unité (amour) et jamais cause de discorde. Cela ne peut s'obtenir qu'en essayant toujours de privilégier ce qui nous unit et de dépasser ce qui nous sépare.

Vous m'avez souvent entendu parler des contradictions de l'évangile ; de fait nous en voyons clairement aujourd'hui.
- Mathieu (12, 30) dit exactement le contraire de ce que nous venons d'entendre chez Marc : « Qui n'est pas avec nous est contre nous, et qui n'amasse pas avec moi, dissipe ».
- Chez Luc nous trouvons les deux formules (10,50) et (11,23) ; de ce fait il n'y a pas moyen de départager.
- De plus, ces paroles de Jésus sont en contradiction avec ce qu'il dit lui-même en Mt 7,22 : « N'avons-nous pas prophétisé en ton nom et n'avons-nous pas expulsé beaucoup de démons ?...Je vous répondrai : je ne vous connais pas, éloignez-vous de moi, maudits ».

La contradiction n'est qu'apparente. Qui n'est pas avec moi est contre moi se rapporte au fait que l'appartenance au Royaume n'est pas quelque chose naturel, qu'elle ne vient pas avec l'ADN. Il faut un véritable effort pour y parvenir.

Rappelez-vous les phrases de l'évangile : »Le Royaume des cieux souffre violence et seuls ceux qui s'y efforcent y parviennent » ; et « étroit et difficile est le sentier qui mène à la vie et peu l'empruntent ». Pour entrer dans le Royaume, un cheminement est indispensable. Il faut naître de nouveau, et pour cela, il faut mourir à ce monde. Appartenir au Royaume est de la responsabilité de chacun, cela exige une attitude vitale qui dépend de chacun.

Qui n'est pas contre nous est pour nous. La phrase signifie que personne n'est exclu du Royaume. Tout individu qui cherche sincèrement le bien de l'homme est en faveur du Royaume de Dieu prêché par Jésus, même s'il ne le connaît pas. Celui-là seul qui rejette l'homme reste à l'extérieur.

La possession diabolique était le paradigme de toute oppression. Expulser les démons le paradigme de toute libération. A l'opposé de tous les mouvements religieux de l'époque, saducéens, pharisiens, Qumran, etc., Jésus annonce un Dieu qui est amour et ne rejette personne, même pas les pécheurs.

Prétendre à l'exclusivité de son dieu, a réduit à néant les meilleures initiatives religieuses de tous les temps. Considérer comme absolue toute idée de Dieu comme si elle était définitive, est la meilleure façon d'entrer dans le fanatisme et l'intransigeance. Monopoliser Dieu, c'est le nier. Mettre des limites à son amour, c'est le ridiculiser.

Notre religion a été plus loin qu'aucune autre dans cette prétention de vérité absolue. Rappelez-vous : « Hors de l'Eglise, point de salut ». Hors de l'Eglise, le salut existe, et plus parfois qu'à l'intérieur.

Rapportant un épisode semblable, et parce qu'on ne les avait pas reçus en Samarie, un disciple demande à Jésus qu'il fasse descendre le feu du ciel pour les détruire. Jésus se borne à dire : vous ne savez pas de quel esprit vous êtes. Deux mille ans plus tard, nous ne comprenons toujours pas l'esprit de Jésus. Nous persistons à vouloir défendre Dieu, sans nous rendre compte que nous sommes en train de défendre nos intérêts les plus méprisables.

Il ne s'agit pas simplement de tolérer le mal qu'il y a chez les autres. Il s'agit d'apprécier tout le bien qu'il y a chez eux.

Douze siècles séparent l'épisode de la première lecture (Nm 11,25-29) et celui que nous rapporte l'évangile, mais l'attitude est la même. Depuis l'évangile et aujourd'hui, vingt siècles ont passé, mais nous n'avons pas bougé d'un millimètre. Nous brandissons toujours le « il n'est pas des nôtres ».

Toute personne qui ose ne pas être d'accord, qui pense ou agit différemment, continue à être exclue. Nous nous en prenons même à celui ou celle qui se risque à penser.

Il faut le dire très clairement. L'idolâtrie théiste a été beaucoup plus nuisible à l'être humain que l'athéisme. Les pires horreurs de l'histoire ont été commises au nom de dieu. Un dieu qui récompense les bons et punit les méchants est une idole, l'équivalent du pire des tyrans. Un tel dieu nous tranquillise, c'est sûr, car s'il agit ainsi, nous sommes d'avance justifiés de faire la même chose.

L'esprit de Jésus va beaucoup plus loin que ce qu'embrasse le christianisme officiel. Dernièrement, l'expression « patrimoine de l'humanité » nous est devenue familière, et elle pourrait sans restriction aucune être appliquée à Jésus : le Christ n'appartient pas à l'Eglise. En réalité, le message de Jésus ne peut être enfermé dans aucune église ou congrégation religieuse. L'intention de Jésus est que toutes les religions, la sienne y compris, découvrent que leur unique objectif est de faire les êtres toujours plus humains. Toute religion qui n'a pas ce projet, est tout simplement fausse.

Dans l'évangile de Marc, que la cause de Jésus ne coïncide pas avec celle du groupe des douze, est un signe pour les chrétiens de tous les temps. Jésus n'est le monopole de personne. Tout ce qui est en faveur de l'homme est avec lui. Tout homme qui travaille pour la justice, la paix, la liberté, est chrétien. Rien de ce qui rend les hommes plus humains ne doit être étranger à un partisan de Jésus. Il est inquiétant que toutes les grandes religions aient été cause de divisions et de guerres.

Le moment est venu de changer les paramètres d'appartenance. Cessons de nous demander si nous « avons les papiers » de chrétiens, ou de bouddhistes ou de mahométans, et donnons plus d'importance à la question de savoir si nous luttons vraiment pour le bien de tout être humain. La jeunesse d'aujourd'hui va dans cette direction, c'est la raison pour laquelle elle critique notre religion et s'en éloigne. Les jeunes ne sont pas d'accord avec ce christianisme de pure forme qui ne nous oblige à rien et qui n'apporte que de fausses sécurités.

Celui qui scandalise un de ces petits..., »Petit » ne veut pas dire « enfant », mais quelqu'un dont la foi est à son début et qui n'est pas encore parvenu à une foi adulte.

Il ne s'agit pas non plus de scandale pour divergences doctrinales.
Ce sont les faits, et eux seuls, qui intéressent Jésus. Parmi les premiers chrétiens, la façon d'interpréter Jésus a été fort diverse, mais une même « praxis » les unissait tous. La manière de vivre est ce qui compte vraiment.

Si ta main te fait tomber...Ces phrases sont construites dans le style sémitique. La main, ou l'œil ou le pied ne pourront jamais te faire tomber. Ce dont il s'agit, c'est d'alerter sur l'importance d'être disciple et sur la relativité de tout le reste. Le but est de changer l'échelle de valeurs courante pour une autre qui soit en accord avec notre être véritable.

La main, le pied, l'œil, sont indispensables à l'action humaine. Plus indispensable encore est d'être au service du bien de l'homme.

Méditation-contemplation

Qui n'est pas contre nous est en notre faveur
et même si quelqu'un s'efforce d'être contre nous,
nous ne devons jamais être contre personne.

Si mon être véritable consiste en ce qu'il y de Dieu en moi,
ce qui nous unit sera toujours plus fort que ce qui nous sépare.

Chercher en tout être humain cette réalité qui nous unit,
voila la vraie tâche du disciple de Jésus.
Jamais le chrétien ne peut fomenter la division (le « désamour »).

Si accepter l'autre tel qu'il est me coûte,
C'est le signe que je n'ai pas encore compris l'évangile.
J'attends encore qu'il change afin de me sentir bien.
Puis-je imaginer que Dieu fasse de même avec moi ?

Texte de Fray Marcos
(Trad. Maurice Audibert)

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